une satisfaction discrète est peinte sur le visage de mathis ; il plisse ses yeux et ses lèvres,
puis face à cette soudaine explosion de notification sur son téléphone, ses prunelles virent en myosis d'étonnement.
une plainte de surprise, prisonnière de ses lèvres, s'enfuit rapidement et résonne un court instant.
il range son appareil électronique, beaucoup trop perturbé par cette soudaine popularité, dû à un simple tag sur une photo de toi qu'il a posté.
mathis ne pensait pas que tu aurais autant d'influence possible sur les réseaux. il est impressionné – mais aussi, en quelque sorte, effrayé.

et même si tu lui fais un compliment, il se tait ; alors, le silence a retrouvé sa couronne. il laisse simplement, la nature chanter,
et offrir son petit spectacle du temps. car la nuit commence déjà à tomber, et au loin, vers l'horizon, il peut voir le soleil se jeter dans cette vaste étendue d'eau qu'est l'océan pacifique.
les touches de roses et de bleus ravissent les yeux ébahis du blond ; un tableau mystique se peint donc devant tes prunelles curieuses.
mathis, d'un air incertain, se dit qu'il est dommage que le couché du soleil soit gâché par les éléments de ce paysage urbain.

la prochaine fois, il veut aller à la plage,
(avec toi)
écouter le son des vagues, il se le promet ;
pouvoir ressentir le sable et le parfum marin,
(à tes côtés)

un son furtif se fait entendre,
comme le clic significatif d'un appareil photo qui s'active. il soupire quand il a compris, et se penche vers le cliché que tu lui montres de lui.
pendant qu'il observe, tu lui dis ces douces paroles.
alors il grimace – tout naturellement, comme s'il était gêné par cette attention inexplicable.

et avec des mots que tu ne connais pas,
d'un français parfaitement bien prononcé :

- je ne suis pas un trésor.

son regard se perd dans le vague ; la mine sereine, car il est peut-être un peu trop absorbé par ses propres pensées, comme s'il avait une quelconque inquiétude.
c'est vrai, tu ne le sais pas, mais mathis est toujours inquiet.
ses mains se réchauffent dans ses poches pendant que ses pas s'arrêtent petit à petit ; sa tête se tourne vers toi.

trop calme,

c'en est presque alarmant.
un maigre sourire s'esquisse immédiatement sur ses lippes roses,
mais il est éphémère.

- on va peut-être devoir se séparer pour aujourd'hui.
avoue t-il, d'une tonalité si suave qu'elle caresserait les oreilles de quiconque l'écouterait.

- tu dois certainement me trouver ennuyeux.
quand il a fini de souffler ses mots, la gorge serrée, sa tête entre automatiquement dans ses épaules levées, le regard baissé,
il retourne dans sa bulle,

celle où il invite toujours la solitude.

il se fait des idées, clairement ;
parce que, non, mathis ne veut pas partir,
il ne sait juste pas ce qu'il pourrait faire de plus avec toi, sans que cela t'ennuie – trop soucieux d'embêter quiconque, et surtout toi.
il ne te connait pas assez en réalité, enfin, il ne connait que celui que tu veux montrer derrière ta caméra. alors il s'imagine bien que tu es quelqu'un d'assez extraverti,
et cette image est soutenu par toute ta communauté.
certes, il te connait souriant, il n'arrête de se dire que tu es cet être si rayonnant,
alors que lui, il n'a rien d'aussi intéressant, il n'inspire rien de bon, qu'un sentiment profond d'abandon.

mathis fait tordre ses lèvres en écoutant tes paroles ; il a l'impression de se faire engueuler,
mais non, tu as raison de dire ce que tu penses – cela permettra de calmer les scénarios qu'il s'invente à chaque fois.
c'est presque insolent de sa part de penser que tu en as marre de lui ; c'est même triste de constater qu'il a toujours,
peu confiance en lui...

- non désolé... je me fais des films...
c'est avoué si timidement, comme s'il tentait de rattraper son erreur de vouloir te quitter pour rentrer chez lui.
il reprend la marche en te faisant signe de le suivre.
bien sûr qu'il ne veut pas que ce rendez-vous amical se termine si vite ; et même s'il est persuadé qu'il vaut mieux être seul, que d'être mal accompagné,
aujourd'hui, il a découvert une facette de toi, qui lui donne envie de dire "c'est mon ami".

puis les secondes passent, et les minutes aussi... un cycle sans fin, mais le temps parfois devrait s'arrêter – c'est ce que mathis se dit.
car cette petite balade aléatoire à tes côtés va bel et bien se terminer ;
vous avez juste échangé, quelques mots ; quelques paroles suffisantes pour signifier que vous vous apprécier,
et quelques fois vous avez savouré la tranquillité.

puis, deux heures écoulées, il fait nuit ; mathis s'arrête devant une petite maison entouré d'un portail fleuri – même en hiver.
son visage se tourne vers toi, un peu déçu ; mais heureux, tellement que son teint s'est coloré d'une couleur pêche, assez sucrée.
il n'a pas envie de t'embêter plus que cela, c'était déjà un vrai plaisir,
qu'il n'aurait jamais pensé partager avec toi.
- c'est chez moi du coup...
en dessous de la sonnerie est écrit en lettres dorés "dumarest", le patronyme de sa mère qu'il ne porte pas,
mais il fait semblant parfois, pour cacher la moitié de son identité.
- je préfère pas te laisser entrer... ma mère est sûrement là et-
un soupir de mélancolie se meurt entre ses lèvres détendues.
- la maison... est hantée, on va dire plus simplement.

sa main tire délicatement le portail alors quand il entre dans le jardin, il tourne son visage,
qui a repris de nouveaux des couleurs, étrangement.
- bonne soirée, gihoe.
c'est vrai, qu'il ne se rappelle pas de ton prénom ; juste de ce pseudonyme qui te colle à la peau
(comme une foutue malédiction, du même nom).
les commissures de ses lippes s'étirent pour qu'il puisse te sourire avant de disparaître devant tes yeux.
mais, il a du mal à comprendre pourquoi, ce sourire-là s'éteint, une fois qu'il a franchi la porte d'entrée.

peut-être bien que la solitude le rend enfin malheureux.